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Lettre à la députée de Saint-Hyacinthe


Projet de loi 15 Réforme Dubé

Madame la députée,


Récemment, notre regroupement national la Table nationale des CDC a joint sa voix à plus de 250 autres organisations québécoises de tous horizons pour dénoncer l’absence évidente de consensus autour du projet de loi no 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace.


En tant que Corporation de développement communautaire des Maskoutains (CDC des Maskoutains) qui regroupe 59 organismes maskoutains et dont les activités se déploient principalement dans votre circonscription, nous vous interpellons aujourd’hui afin de vous demander de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour freiner l’adoption de ce projet de loi centralisateur qui n’améliorera pas l’accès aux soins dont nous avons besoin.


Vous n’êtes pas sans savoir que le projet de loi no 15 vient chambouler plusieurs pans du réseau de la santé et des services sociaux québécois. C’est pourquoi nous nous opposons à l’hypercentralisation, à la perte de démocratie et à l’opacité à venir dans la gestion du réseau.


Comme regroupement intersectoriel ancré dans sa communauté, la CDC des Maskoutains se questionne sur la prise en compte des réalités locales, sur l’instrumentalisation des organismes communautaires en santé et services sociaux ainsi que sur la privatisation possible de notre système de santé.


Dans les dernières années, les gouvernements successifs ont laissé la porte grande ouverte à la mise en place d’un réseau de santé privé parallèle. D’ailleurs, le Globe and Mail présente le Québec comme le champion de la privatisation des soins de santé au Canada : 642 médecins québécois (dont 432 médecins de famille) pratiquent exclusivement dans le système privé alors que pour tout le reste du Canada ils ne sont que 12[1] ! Qu’en serait-il de notre temps d’attente si ces 642 médecins travaillaient dans le secteur public? Et si le personnel qui les accompagne faisait de même, à quels services aurions-nous à nouveau accès?


Avec le projet de loi no 15, le gouvernement choisit d’orchestrer un système où l’État subventionne les compagnies privées pour qu’elles dispensent des soins de santé. On rassure la population en lui disant qu’elle n’aura rien à payer, car ce sera couvert par la carte soleil, mais nous ne sommes pas dupes, ce sont les Québécoises et les Québécois qui collectivement devront assumer des coûts beaucoup plus élevés en santé afin de couvrir la portion de profits inhérente à la médecine privée.


De plus, la carte d’assurance-maladie ne paiera pas indéfiniment ces soins privés. Elle nous est d’ailleurs déjà de moins en moins utile pour recevoir des services en GMF après la réforme de 2015. Devrons-nous, comme citoyens et citoyennes, nous endetter pour accéder à des soins de qualité?


Le détournement des patients vers les soins privés ne soulage pas le réseau public, il est plutôt à la source des problèmes d’accessibilité. Les travailleurs de la santé ne poussent pas dans les arbres, chaque travailleur au privé est un travailleur perdu pour le réseau public. Et les soins dans le marché privé ne visent pas à répondre aux besoins populationnels, à prévenir la maladie, mais bien à maximiser le profit en augmentant le volume d’interventions réalisées trop souvent pour les cas les moins urgents ou complexes.


Le projet de loi no 15 accélérera le développement de la médecine privée au Québec. La santé n’est pas une marchandise, c’est un droit fondamental. Vous avez le pouvoir d’accélérer ou de freiner l’effritement de l’accès aux services accessibles, gratuits et universels. Resterez-vous les bras croisés devant la destruction de notre système de santé et de services sociaux en adoptant le projet de loi no 15? Sachez que nous, nous le défendrons sans relâche!


En espérant que votre engagement envers vos concitoyennes et concitoyens ainsi que votre dévouement au service public vous inciteront à prendre cette question au sérieux. Dans le cas contraire, le gouvernement du Québec fera face à la grogne populaire d’une société qui voit s’étioler le système de santé qu’elle a fièrement érigé il y a une soixantaine d’années.


Nous vous prions d’agréer, Madame la Députée, l'expression de notre considération distinguée.

 

[1] Tu Thanh Ha et Yang Sun, « Why more Quebec family doctors are leaving the public health system », The Globe and Mail, 8 et 9 août 2023



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